freddie-gibbs-madlib-pinata_1         Difficile d’imaginer deux parcours plus divergents que les protagonistes de cette pinata. Pourtant la paire improbable travaille depuis 2009 sur l’un des projets les plus attendus de cette première moitié 2014. D’un coté Madlib génie en roue libre explosant les codes d’un genre parfois gangrené et développant sa vision autiste d’un hip-hop instrumental. De l’autre Freddie Gibbs figure montante d’une scène de Chicago en perte de vitesse, expatrié depuis vers la cité des anges et mitraillant ses rimes syncopées à la manière du caméléon.

Passez ces présentations hasardeuses c’est bien en plaçant la Pinata sur la platine que cette dernière libère son lot de sucrerie. En effet Mad et Gibbs produisent ici un lot incalculable de classiques, passant avec aisance de l’égotrip des familles à une tirade introspective ou encore une atmosphère cinématographique poisseuse. D’ailleurs en parlant de cet aspect c’est bien cette image là qui ressort le plus. Sans frôler le concept album comme sur « Twelve Reasons To Die » de Ghostface, nos joyeux lurons lorgnent gentiment vers le 7eme art. Gibbs dira lui-même qu’ils ont imaginé cet effort comme « un film de gangster sur fond de blaxploitation ». Aucune surprise ici donc et l’on se laisse embarquer sans effort dans cet univers ou Madlib laisse transparaître sa fascination pour les expérimentations sophistiquées de Curtis Mayfield en passant par Issac Hayes. En parlant de cinéma le casting des seconds rôles et lui aussi tout aussi impressionnant. Raekwon, Danny Brown, Ab-soul ou encore Earl Sweatshirt sont de la partie et viennent apporter leur contribution à cette œuvre démentielle.

Au final la grande force du disque c’est avant tout la cohésion sans faille qui règne entre les deux protagonistes. Alchimie parfaite de l’excellence d’un flow hargneux pour le Mc de Chicago allié aux instrumentations obliques du producteur californien. Une œuvre indispensable qui ravira les amateurs d’aspartame de 7 à 77ans.

Joël Roblochon***