Samedi 5 décembre 2020, les livreurs alimentaires pour les plates-formes numériques (Stuart, Deliveroo, UberEats, JustEat) se sont réunis devant le McDonald’s de Compans-Caffarelli pour dénoncer leurs conditions de travail. Ils ont décidé de faire grève ce soir-là en ne prenant pas les commandes.

Yohan Taillandier est secrétaire général du syndicat des livreurs ubérisés toulousains (de la CGT). Il a souhaité organiser une manifestation ce samedi pour informer sur les conditions de travail des livreurs et coursiers pendant la crise sanitaire :

« Il y a deux ans, on était à 15 euros de l’heure, l’année dernière à 13 et maintenant entre 9 et 10 euros de l’heure. Après il faut retirer l’URSSAF, donc 22 pour cent » du chiffre d’affaire.
« Et puisqu’on n’a pas le chômage, ça fait des drames ».

Négociations entre les plates-formes et les livreurs

Suite à une précédente mobilisation des livreurs, le 30 octobre dernier, UberEats a accepté de discuter avec le collectif :

« C’est la première fois qu’UberEats Toulouse et UberEats France nous ont contacté mais plus que discuter, nous voulons négocier. Là on a l’impression que le rapport de force est en train de changer, c’est pour ça qu’on veut faire véritablement pression sur les plateformes pour qu’elles changent leur mode de fonctionnement. »

Au-delà de la rémunération des livreurs, c’est leur situation pendant la crise sanitaire qui est aussi pointée du doigt. Yohan Taillandier relève le manque de soutien et d’aide des plateformes pendant cette période. Pour lui, ils ont été mis en danger. Entre les deux confinements, UberEats a par ailleurs recruté beaucoup de nouveaux livreurs à Toulouse, mettant encore plus ses coursiers en compétition.

Manifestation interdite par la préfecture

La manifestation des livreurs toulousains devait partir ce samedi soir de Compans-Caffarelli pour déambuler dans les rues de Toulouse, passant devant les restaurants qui ont souvent recours à leurs services, pour se terminer aux Carmes. Mais la veille, le préfêt de Haute-Garonne a interdit ce rassemblement.

Le directeur du McDonald’s de Compans est venu à la rencontre les livreurs en grève, afin de connaître leurs revendications. Il s’est dit concerné par leur lutte et conscient de certains « abus » des plates-formes.

Yohann Taillandier, lui-même livreur, raconte discuter avec les restaurateurs : « Quand on leur dit qu’on est payé neuf ou dix euros de l’heure, ils se rendent compte que ce n’est pas possible de continuer ainsi ».

Vers une législation pour encadrer le travail des livreurs

Le rapport Frouin, commandé par le gouvernement, a été déposé la semaine dernière. Il vise à étudier le travail des livreurs de repas et à éviter le travail déguisé.

L’année 2021 sera donc cruciale pour ces travailleurs « uberisés ». Si ce n’est par une législation française, voire européenne, plus favorable pour eux, ce sera pas des collectifs. A Paris, à Bordeaux, et bientôt à Toulouse, ils se réunissent pour réfléchir ensemble aux alternatives aux plateformes. La manifestation interdite de samedi dernier aura quand même permis à quelques livreurs de se rencontrer et d’échanger autour des expériences de chacun et de l’évolution de leur profession.

– un reportage de Simon Guérin-Besnier pour Campus FM